Les assassinats du 19 mars au musée du Bardo, à seulement quelques jours de son ouverture, ont décidé les organisateurs à actualiser la bannière sous laquelle défilerait la marche d’ouverture (1).
Celle-ci disait : « Les peuples du monde unis pour la liberté, l’égalité, la justice et la paix, en solidarité avec le peuple tunisien et toutes les victimes du terrorisme, contre toutes les formes d’oppression ».
A Tunis, la vie suit presque son cours normal. Presque, car des policiers et des militaires, armes lourdes en bandoulières sur leurs gilets pare-balles, montent la garde devant les bâtiments publics. Les ambassades sont protégées par des barbelés, des blindés, des sacs de sable. Dans tous les endroits publics, magasins, restaurants, des vigiles contrôlent activement et systématiquement les clients. En dehors de ces mesures sécuritaires, Tunis a son visage habituel.
Au lendemain des attentats, les Tunisiens sont particulièrement sensibles à notre venue et leur hospitalité naturellement chaleureuse, en est encore renforcée.
Durant 5 jours, le campus de la faculté El Manar, l’université où se tenait le FSM, a grouillé de centaines de rencontres, de débats et d’activités, le tout sous haute surveillance policière : verrouillage de tous les accès, portiques de sécurité, fouilles systématiques.
Une nouvelle forme d’internationalisme ?
Le FSM est une nouvelle forme d’internationalisme, de tous les exploités, de tous les opprimés, de tous les peuples. Un internationalisme tel qu’il est actuellement possible. Donc qui cherche encore sa voie, ses voies, à travers ses propres contradictions, ses ambiguïtés.
Ce qui lui donne parfois un côté « Foire Sociale Mondiale ». Des représentations, d’organisations ou de syndicats, voire de religions, dont on se demande ce qu’ils viennent faire dans une telle réunion, des noyautages, par l’envoi de délégations de plus de 1000 participants, payés par les Etats algérien et marocain, en vue de peser sur les débats, enfin l’irruption des premiers commerçants, et sponsors, attirés par l’aubaine de ces milliers de clients, fussent-ils altermondialistes. Il faudrait faire un peu de ménage, revenir aux fondamentaux, peut-être re-fonder ?
Mais le FSM c’est bien plus que ces quelques contradictions. C’est actuellement l’une des principales matrices de nombreux mouvements sociaux. Une matrice qui ne forme pas un corps homogène, monolithique, mais qui permet à la diversité de prendre forme. Contre le TTIP-TAFTA, pour les droits des femmes, pour l’annulation des dettes publiques, contre le réchauffement climatique, en solidarité avec la Grèce, la Palestine et tous les peuples en lutte, le FSM permet que les convergences, comme les ruisseaux deviennent rivières, le FSM permet qu’elles se jettent les unes dans les autres. Reste encore à trouver la pente qui transformera toutes ces forces en grands fleuves capables d’entraîner tous les changements dont nous avons besoin, d’urgence.
Les prochains rendez-vous des altermondialistes seront la conférence internationale pour le climat à Paris qui se tiendra en décembre 2015, et, surtout pour les européens, les actions de solidarité avec le peuple grec, contre l’austérité. Des luttes vitales, et ce n’est pas une image, il en va en effet de notre survie.
(1) La marche de clôture, organisée le dernier jour du forum, était dédiée à la solidarité avec le peuple palestinien.